dimanche 28 juin 2009

Naser

Naser est l’étudiant à l’Ecole Supérieure de Réalisation Audiovisuelle.
La cinématographie est sa passion de toujours. Il est né à quelques pas du cinéma à Dakar.
La bourse qu’il a obtenue il y a deux ans était la réalisation de son rêve le plus fou.

Les cours, les ciné-clubs remplissent ses journées.
Il vient souvent dans des centres d’accueil de jour pour les jeunes. Il branche son ordi portable et collé à l’écran il passe des heures en réalisant des scénarios ciné pour ses études et des concours. Il en a gagné déjà quelques-uns qui lui ont valu sa bourse d’étude.

Le soir il regagne un petit parc au centre ville, s’allonge sur un banc, s’attache lui-même et son p.c. avec une ceinture au banc et il s’endort.

C’est tout ce qu’il a.

dimanche 21 juin 2009

Noufel.

Noufel est d’origine marocaine. Jeune, gai, il a du punch.

Il est de ceux qui à peine arrivé dans un endroit, paraissent connaître tout le monde.
Il sait rire et il sait rire de lui-même et il fait rire tout le monde autour de lui.

Pendant qu’il attend son linge à la laverie, il me raconte ses rêves avec enthousiasme
et conviction. C’est rien que aujourd’hui c’est le squat et le job au noir, demain c’est un CDI et une jolie femme dans leur appart à eux !
Il me serre la main, il me lance un joyeux : Ciao ! à la prossima ! Et il sort tout droit dans les bras des policiers qui l’attendent à notre insu dehors et qui l'embarquent dans la voiture.

Noufel n’a pas de titre de séjour en France.

dimanche 14 juin 2009

Rieur.

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Christophe fait partie d’une bande de copains qui campent sous les balcons de la gare routière, depuis des mois enfermés dans un cercle infernal de beuveries.

C’est sont des instants rares de lucidité qui éveillent en lui des sentiments de regrets et un besoin impérieux de manger. Il est le plus jeune, à peine 18 ans.
Avec un prêtre du quartier je leur porte la bouffe et quelques fois je file à Christophe des bons pour manger au Fourneau Economique dans le vieux Nice.
Les autres camarades ne se déplacent plus.
Christophe est toujours de bonne humeur, il jase, blague et rit à n’en plus finir.

Un jour il m’annonce que la bande de copains a décidé de quitter les lieux pour aller en Italie.
Le jour même il se pointe au Fourneau Economique, l’air pressé et avec un sourire malicieux me dit : Nous partons. J’ai trouvé quelque chose pour toi. Je l’ai trouvé. Il accentue lentement la dernière phrase comme s’il voulait me rassurer.
Il pouffe, il ne se retient plus. Il me montre un sac et je sais déjà qu’il s’agit d’une de ses blagues. Puis il me dit Ciao et fuit comme un forcené.

Dans le sac je trouve un ordinateur portable avec des câbles visiblement arrachés violemment de leurs prises …
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dimanche 7 juin 2009

Crois-tu en Dieu ?

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Il vient de dîner. Il sort de la salle à manger et s’arrête au milieu de la rue. S’allume une cigarette et puis lentement s’approche de moi.
Je ne le connais pas. Je le vois pour la première fois.
Chacun de ses mouvements trahit la fatigue des nuits passées dans la rue. Vieille chemise chiffonnée et pantalon usé de couleur indescriptible contrastent avec les chaussures pointues dernier cri. Il y a quelque chose de troublant dans son aspect.
Il vient tout prêt de moi. L’odeur écœurant d’un corps délaissé m’enveloppe immédiatement. Je peux voir son visage à quelques centimètres du mien. Visage raboteux, brûlé par le soleil. Visage angoissé. Il évite mes yeux et regarde quelque part derrière moi. Mais je peux voir ses yeux rouges et moites.
Crois-tu en Dieu ? – me dit-il.
Et avant que je réagisse il fait un signe de tête et ajoute – Oui, si tu es là, tu dois croire en quelque Dieu.
Il se tourne brusquement et disparaît à l’angle de la rue.
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