lundi 27 avril 2009

Il m’a fait changer mon numéro


« Je suis sérieux ! Regard chef, ce n’est pas bidon ! »
Et il étale sur la table une liasse de certificats de ses compétences professionnelles. « Il me faut une adresse et un téléphone et je décrocherai un job. Tu vas voir, j’ai un métier respectable »

Richard insiste sur le téléphone qu’il lui faut impérativement. À côté, sa femme allemande assise sur leurs énormes sacs à dos ne comprend rien de notre conversation. Tous les deux, nous jetons un regard sur la femme silencieuse. Richard me tape légèrement la poitrine avec son poing et me dit doucement « Aide-moi ».

Je lui donne rendez-vous le surlendemain. Un instant après, je me rends compte que je n’ai plus mon portable. Je me tape nerveusement sur les poches et me rappelle des mouvements habiles et significatifs de Richard pendant notre entretien. Je décide quand même d’acheter un nouveau numéro de téléphone en espérant que je saurai négocier avec lui pour récupérer le mien.

Le surlendemain ils ne viennent pas au rendez-vous. « Naïf » - me dis-je. « Il m’a eu » ! J’essaie d’appeler mon portable volé et je tombe toujours sur mon répondeur automatique.

Le lendemain matin au petit déjeuner en feuilletant Nice Matin, je tombe sur la photo de … Richard. Sidéré, je lis « Terrible drame du tunnel de Villefranche-sur-Mer. Le couple de routards qui traversait le tunnel meurt happé par le train » Je regarde la photo de Richard qui semble me fixer et dire : « C’est pas bidon, chef ! »

jeudi 9 avril 2009

Fourmilière


Avenue Médecin, c’est un vrai chantier de la manche des femmes tziganes.

Chaque matin, à la même heure, les femmes accompagnées d’enfants se déploient avec la même rigueur, dans les mêmes endroits. Silencieuses, disciplinées, laborieuses … telles des fourmis dans une grande ville.


jeudi 2 avril 2009

Gentleman


Pendant longtemps, on n’a rien su de lui. Un quinquagénaire peut-être, bronzé, élancé. Il parle peu, presque rien. Le français n’est pas sa langue maternelle et il la connaît à peine.

Gentil et calme. Ses cheveux en désordre ne lui enlèvent rien de son air de gentleman. Ce qu’il porte sur lui trahit sa longue vie dans la rue mais ne le rend pas vulgaire pour autant. Il boit son thé avec un léger sourire et il prend son temps.

Il reste assis simplement un bon moment sans chercher aucun contact avec ceux qui viennent au Fourneau Économique, puis il se lève, remercie et prend la direction de la plage – sa demeure. Il s’appelle Stephen et ses origines sont écossaises. Son anglais est exquis et distingué. Quand il parle, on se croirait dans un salon de thé quelque part en Angleterre.

« In England, the tea-pot you have never wash, just rince » m’explique-t-il. Il me demande s’il y a quelque chose qui me manque de Pologne. A mon tour je lui pose la même question. Il devient songeur et il répond « My family… » Il se lève, me tend la main et dit « Next thursday, I hope ? »

Je sais que ce n’est pas souvent qu’il parle aux autres.